La question de l’identité numérique; qui déborde sur la vie privée ou bien qui soulève sans cesse la problématique de la définition du caractère privé des données, provoque continuellement des remous, mais il semble qu’en ce moment ce soit souvent Google qui tente de voir les limites.
C’est un fait très rare, qui montre son importance. La CNIL et les autorités de protection des données de l’Allemagne, du Canada, de l’Espagne, de l’Irlande, d’Israël, de la Nouvelle-Zélande, des Pays-Bas, de l’Italie et du Royaume-Uni se sont associés pour envoyer à Google une lettre commune. Ils demandent au géant américain de “montrer l’exemple” en matière de protection de la vie privée des internautes, en tant que “chef de fil du monde virtuel“.
Cette introduction est issue d’un article posté par Guillaume Champeau sur le site Numerama. Il cite l’exemple du lancement “catastrophique” d’un nouveau service, Buzz, qui permettrait de savoir avec qui les utilisateurs communiquent le plus souvent.
Google avait rapidement corrigé le tir et s’était excusé, mais trop tard aux yeux des gardiens de la vie privée. “Nous vous demandons, comme à toutes les organisations qui détiennent des renseignements personnels, d’intégrer les principes fondamentaux de protection de la vie privée dès la conception de nouveaux services en ligne“, écrivent les organisations.
Pour elles, le fait de ne pas avoir clairement informer les utilisateurs de Google Buzz des modalités de son fonctionnement a constitué “une atteinte au principe fondamental et mondialement reconnu de protection de la vie privée selon lequel les personnes devraient pouvoir contrôler l’utilisation de leurs données personnelles“.
Même si pour l’instant les CNIL signataires ne comptent pas engager d’action judiciaire contre Google, elles se content de lui demander d’ “expliquer comment il se conformera à l’avenir aux lois nationales en matière de protection de la vie privée“.
Les CNIL souffrent du manque de moyens pour assurer une défense aussi dynamique que possible de l’identité humaine, des droits de l’homme (et du droit à l’oubli comme nous en parlions dans cet article précédent), de la vie privée (comme dans les réseaux sociaux, nous en parlions dans cet article) et des libertés.
Des sénateurs proposaient d’ailleurs de “renforcer les moyens et la légitimité de la CNIL” française, dans le rapport que nous commentions dans cet article.
Il s’agit là d’un imbroglio, qui ne cesse de faire couler de l’encre, numérique ou pas, sur lequel il est difficile d’obtenir un consensus :
- les pays doivent harmoniser les pratiques : rappelons l’exemple proche des donnés collectées par Google, encore eux, en Allemagne avec leur fameuse voiture alimentant Google Street View. En effet, le dispositif collecte aussi les emplacements des réseaux wifi privés et les adresses MAC (voir les notes en bas de l’article) des appareils connectés à ces réseaux. L’adresse unique de votre appareil est elle une donnée personnelle ? Un réseau Wifi installé chez soi mais visible de l’extérieur relève du domaine public ou du domaine privé ? Chaque justice/jurisprudence est souveraine dans son pays.
- de la même façon se pose le problème de l’adéquation entre des autorités nationales et des volontés politiques des pays : les problèmes des avis de la CNIL face à la création du fichier EDVIGE ; le Conseil Constitutionnel intervenant dans les textes de la loi Hadopi tentant de renverser l’expression de la présomption d’innocence.
- quels moyens ? “En 2007, la Cnil a enregistré 4.455 plaintes pour non-respect de la loi Informatique et libertés, qui règlemente l’utilisation des données personnelles informatisées, soit une augmentation de 25 % par rapport à 2006.”, dépêche de l’AFP.
- ce problème touche à la vision de soi en tant que membre de la société et de l’anticipation de ce qui peut s’y passer. cela me fait penser à des phrases toutes faites du genre : “je n’ai rien à me reprocher donc peu importe que l’on mette des caméras de surveillance à tous les coins de rue”, l’argument est jeté et la réflexion s’arrête là…
- quel projet de société ? quelle importance donner à la protection de l’individu quand les auteurs de cette lettre estiment “que trop souvent, le droit à la vie privée des citoyens du monde est laissé de côté lors du lancement de nouvelles applications technologiques” ?
Mince, un article entier sur les atteintes aux données personnelles sans digresser sur Facebook…
Toutefois, ce n’est pas vraiment un article car l’exhaustivité des informations dans ce domaine relève du Graal. Les réflexions et les réactions, politiques ou des entreprises, n’en sont encore qu’au début.
Site d’origine de l’article sur Numerama
La lettre commune des CNIL adressée à Google et d’autres acteurs d’Internet